LE GAI TAPANT

LE GAI TAPANT

un hommage à Jean Le Bitoux ( 1948 – 2010) par Voto et Goa,
paru en juin 2011 chez Épicentre Films Editions

Dynamique portrait d’un militant de la cause des Lesbiennes, Gais, Bisexuels et Transsexuels depuis 1968 jusqu’à sa mort en 2010, qui fut le dynamisme même !
Il y a chez Jean Le Bitoux une allergie frénétique à l’intolérance et à l’injustice qui rappelle celle de Voltaire. Rien de ce qui est humain et donc rien de ce qui est homo ne lui est étranger : il fut, sa vie durant, un infatigable accoucheur de la parole libre et du droit à l’affirmation politique, au sens premier du terme, affirmation de soi dans la cité, pour celles et ceux qui désirent et aiment à contre-courant de l’hétérodoxie et qui, loin d’être une menace pour l’humanité, sont au contraire un des ferments de l’humanisme par l’expression même de leurs différences : aimer à contre-courant, c’est inquiéter et donc libérer les peurs, aider à s’en purifier en les reconnaissant chez les autres et en soi, aider la société à reconnaître toutes formes de vie qui exprime le foisonnement existentiel des différences, des cultures et des comportements, et finalement le droit au bonheur de chaque individu dans le côtoiement et le respect de la variété infinie de ces aptitudes au bonheur. N’en déplaise à feu Jean-Paul II : l’homosexualité est culture de vie si le corps, le cœur et l’esprit oublient la coutume et la haine de l’autre, quand ce dernier bouscule les habitudes, et font à l’homosexualité la place que la nature et la culture humaniste lui ont faite.

Jean Le Bitoux, en vrai militant, a travaillé sur le passé, le présent et l’avenir de la cause des L.G.B.T. :
– il a aidé ses contemporains à sortir du tabou multiple de l’holocauste de la seconde guerre mondiale et à y inclure les homosexuels. Il a symboliquement accompagné l’Alsacien Pierre Seel dans un travail de libération de la parole pour que la France, comme l’Allemagne, reconnaisse l’ignominie de toutes les persécutions, y compris celle des homosexuels au triangle rose dans les camps de la mort.
– il a œuvré à la fierté homosexuelle, à la sortie du placard et de la nuit des identités L.G.B.T. : sa participation au mouvement du F.H.A.R. né en 1971, sa création, avec Michel Foucault entre autres, de l’hebdomadaire « Le Gai-pied « en 1979, son implication dans la création de la première Gaypride parisienne, Marche des fiertés, à la fin des années soixante-dix, sur le modèle de la première gaypride américaine en 1970
– et bien d’autres combats montrent la puissance solaire du libérateur infatigable que fut Jean Le Bitoux.
– il a lutté jusqu’au dernier souffle contre le SIDA, le grand ennemi du dedans et non l’ordalie punitive que certains ont voulu y voir : toute forme de mise à mort trouve Le Bitoux aux créneaux et le film de Voto et Goa, par son montage haletant, souligne ce surcroît d’énergie qu’a créé la maladie chez lui avant qu’elle ne l’emporte. Le Bitoux a gardé le goût du soleil et de la vie jusqu’au bout, jusque dans la cérémonie, organisée selon sa volonté, de son enterrement dans le village de naissance de son dernier compagnon africain, au Mali. La mort y est conjurée par les danses, les chants, les fleurs…

Le Gai Tapant, avec son montage frénétique comme l’homme auquel il rend hommage, est un film qui donne la pêche ! On y voit comment un fils de bonne famille de Bordeaux se vit et se construit en écharde permanente contre les conformismes et toutes leurs cyniques ou secrètes manières de tuer la vie différente. On y apprend à ne pas se laisser voler sa vie, à recueillir un peu de la graine de ce grand résistant dont la vie et la mort nous apprennent que le droit à la différence a été, est et restera à conquérir toujours. Nous avons besoin de ces héros humbles et formidables en même temps, comme Harvey Milk et Jean Le Bitoux, pour nous faire notre gai Panthéon. Merci à Voto et Goa d’avoir recueilli, en 54 minutes, cette belle énergie pour la transmettre !

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Journal d’Omelette. Avec 1 DVD
Rémi Lange

Date de parution : 01/05/2011
Editeur : ErosOnyx
EAN : 9782918444077
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Résumé de Journal d’Omelette. Avec 1 DVD

Omelette ou un film sur un « coming out ». Comment dire à sa famille que l’on préfère les garçons et que l’on vit en couple avec son petit ami, Antoine ? Rémi Lange, jeune encore, il avait 24 ans, a eu l’idée de faire cette « confession » à sa mère, sa soeur, sa grand-mère en filmant leurs réactions, donc caché derrière sa caméra. Mais aussi à son père, divorcé de sa mère. Là, ce fut la surprise. Le Journal d’Omelette est contemporain du journal filmé, journal vérité, journal cruauté contemporain. Il est aujourd’hui publié pour la première fois. Il prolonge et perpétue la surprise que fut le film lors de sa sortie en 1998. Il est précédé d’un avant-propos chaleureux et en même temps très lucide sur cette « confession ».

Les auteurs en sont Olivier Ducastel et Jacques Martineau, eux-mêmes cinéastes (Jeanne et le garçon formidable, leur premier film, sélectionné au Festival International de Berlin et deux nominé aux Césars, ou dernièrement L’arbre et la forêt, Prix Jean Vigo 2009). Leur avant-propos centre leur regard sur la figure du père. Puisque le DVD du film Omelette accompagne le livre, le lecteur pourra, à son gré, lire d’abord le Journal commencé en 1993 et visionner ensuite le film ou vice versa, revenir ensuite au livre pour lire tout un dossier comportant les réactions de la famille après le « coming out » de Rémi, l’accueil de journalistes entre 1994 et 1998 et divers jugements de critiques. Sa curiosité pourra enfin être satisfaite par l’entretien abondant entre l’éditeur et l’auteur qui, réalisé en 2011, clôt l’ouvrage en décrivant le parcours du cinéaste depuis 1993.

FUGUES (Montréal, Québec) réagit au Journal d’Omelette

En 1998, Rémi Lange diffuse en salle Omelette, un film tourné en super 8, qui est axé sur un thème éminemment personnel — comment annoncer son homosexualité à sa famille et, surtout, la crainte de leurs réactions.

Une démarche qui lui permet de se décharger d’un fardeau — mais qui amènera également sa mère à lui faire une révélation choc! J’ignore si un autre projet du genre fut déjà réalisé, mais il est assez troublant de pénétrer aussi profondément dans l’intimité d’un homme, de contempler ses incertitudes, ses hésitations, ses contradictions, de même que celles de ses proches, qui sentent peser sur eux le regard de la caméra toujours omniprésente.

Le film obtint un succès critique et populaire relativement important et fut retenu pour faire partie des collections permanentes du Centre Pompidou. Les éditions ÉrosOnyx nous présente ici un document exceptionnel: le journal personnel de Rémi Lange, rédigé pendant le tournage, suivi d’un dossier des réactions suscitées par le film (correspondance avec sa famille, revue de presse) et, finalement, un entretien réa-lisé en 2011 avec ce dernier portant sur son parcours depuis 1992. Le tout est accompagné du DVD du film avec de multiples suppléments composés d’archives filmiques personnelles.

Attention! Il s’agit d’un DVD de zone 2. Il est donc possible que certains lecteurs ne puissent le lire. Il ne devrait cependant pas y avoir de problèmes avec le lecteur d’un ordinateur. L’ouvrage n’est pas distribué sur le marché québécois; il est donc suggéré de le commander via une librairie française en ligne comme, par exemple, Amazon.fr.

Rémi Lange. Cassaniouze, France : ÉrosOnyx, 2011. 127p. (Collection Images)

« UN DERNIER JARDIN » de DEREK JARMAN – le DVD

Dans la rubrique À lire du site d’ErosOnyx Éditions, Claire Lippus dit son admiration pour le livre de Derek Jarman. Voici un extrait de ce qu’elle y écrit :

« Son jardin, comme ses films, est à la fois construit et sauvage, austère et sensuel. Il va servir de décor à un film étrange où les images du jardin ( à la fois Eden et Gethsemani) se mêlent à des scènes surgies des rêves de l’auteur, endormi sur son bureau, alors que le vent et la pluie pénètrent dans la maison. Dans une sorte de florilège-testament, on retrouve les obsessions de Jarman : personnages bibliques et martyrs, bourreaux au service d’un ordre policier et surtout militantisme homosexuel. Sur ce dernier point, plus que le chemin de croix du couple torturé, on aime la nudité des corps qui s’enlacent et s’embrassent sous le regard pur d’un garçon enfant. On n’est pas loin de Sebastiane… »

UN DERNIER JARDIN de DEREK JARMAN

Car l’amour et la mort sont une même chose
– Ronsard

Quand, en 1986, Jarman achète une maison de pêcheurs, à Dungerness, dans le Kent, il est un réalisateur très connu : Sebastiane (1975), Jubilee (1977), Caravaggio (1986) jalonnent sa carrière, ainsi que d’innombrables vidéo-clips et une œuvre de peintre et de décorateur (notamment avec Ken Russell).

Il y a une part de hasard dans la rencontre de Jarman avec cette maison, mais elle lui plait d’emblée, par sa couleur (noire avec des fenêtres jaune canari), le terrain d’apparence aride qui l’entoure, et le paysage marin avec, au fond, la centrale nucléaire. Cette centrale enchante Jarman qui écrit : « C’est une pure splendeur. La nuit, on dirait un paquebot, ou un Manhattan plus modeste, illuminé par une myriade de lampions multicolores. »

Depuis son enfance, Jarman aime la botanique et le jardinage. Les fleurs (plus précisément les valérianes) ont accompagné ses premiers émois amoureux. Elles peuplaient le jardin abandonné où l’emmenait Johnny, l’aviateur, son premier amour…Il va entreprendre de créer, sur les champs de galets qui entourent la maison, une œuvre d’art qui rivalise avec ses plus grands films : jardin magique, qui commence par des cercles de pierres, soigneusement choisies, pierres percées, enfilées en colliers ou associées à de vieux outils et à du bois flotté. Jarman pense aux cercles des cromlechs, à la magie celtique, et certains voisins voient dans ces cercles des intentions maléfiques contre la centrale nucléaire ! Les premiers végétaux du jardin sont une aubépine qu’il plante et un chou marin énorme, espèce locale méticuleusement décrite. Puis, d’innombrables plantes vont occuper les trous aménagés entre les galets. Jarman veille sur chaque plant avec amour. Il réalise son rêve de jardinier : « Le paradis hante tous les jardins, mais seuls certains jardins sont des paradis. Le mien fait partie du nombre. » Un dernier jardin (Ed . Thames & Hudson.1995) est un très beau livre de botanique, imprégné d’amour de la vie et de refus des conventions. Jarman est fasciné par les plantes ; les contempler lui apporte la sérénité et la paix. Le courage aussi. Elles sont un modèle d’acharnement à vivre. Au moment où il commençait le jardin, Jarman venait d’apprendre qu’il était séropositif, ce qui, à l’époque, était une condamnation à mort. Créer le jardin, c’est une façon de survivre. Les plantes s’épanouissent alors qu’il décline, comme s’il leur transmettait la vie.

Son jardin, comme ses films, est à la fois construit et sauvage, austère et sensuel. Il va servir de décor à un film étrange où les images du jardin ( à la fois Eden et Gethsemani) se mêlent à des scènes surgies des rêves de l’auteur, endormi sur son bureau, alors que le vent et la pluie pénètrent dans la maison. Dans une sorte de florilège-testament, on retrouve les obsessions de Jarman : personnages bibliques et martyrs, bourreaux au service d’un ordre policier et surtout militantisme homosexuel. Sur ce dernier point, plus que le chemin de croix du couple torturé, on aime la nudité des corps qui s’enlacent et s’embrassent sous le regard pur d’un garçon enfant. On n’est pas loin de Sebastiane.
The Garden est un film exubérant, désordonné, passionné et très personnel. La brutalité y voisine avec la tendresse, un travelo en lamé violet avec un christ austère, les couleurs explosent sans crainte du mauvais goût. Mais tous ces excès, ce désordre kitsch, ne parviennent pas à masquer le chant secret des poèmes qui émaillent le film et le livre. Poèmes de désolation ( « ils sont morts dans un tel silence »), mais poèmes d’amour pour des compagnons charnels tendrement évoqués :
« Matthew baisa Mark baisa Luke baisa John
Qui fut étendu sur la couche où je m’étends
Chantez ce chant et que vos doigts s’effleurent encore. »

Que le lézard tatoué, sous un bouquet de fleurs, sur le bras de Keith Collins ( que Jarman appelait HB et qui fut son dernier compagnon), et les plantes qui continuent de pousser dans le jardin, puissent témoigner des liens entre la vie, l’amour et la mort.

Hommage à Daniel SCHMID

Voici dix ans qu’est mort Daniel Schmid, en 2006. Sous le titre, Le chat qui pense, une maison allemande a sorti en 2011 un DVD qui est le bienvenu, bien qu’il ne soit pas encore disponible en France. Notre rubrique « Actu-Coup de cœur » en parle abondamment.

« Daniel SCHMID, le chat qui pense »… et l’albatros des Grisons

Daniel SCHMIDT, le chat qui pense… et l’albatros des Grisons

ErosOnyx Éditions salue la sortie en DVD, chez Salzbeger & Co, du film Daniel Schmidt, le chat qui pense, réalisé par Pascal Hoffmann et Benny Jaberg, projeté à la dernière Berlinale de février 2011. Il s’agit d’un bel hommage consacré, cinq ans après sa mort, à Daniel Schmidt, metteur en scène de Suisse alémanique, hommage qui annonce, espérons-le, la sortie en DVD soigneusement édités comme ils le méritent, de ses films-poèmes au ton, au rythme et aux coloris variés et profondément originaux, comme La Paloma, L’ombre des anges, Violanta, Hécate, Le baiser de Tosca, Hors-saison, Visage écrit…

Le DVD est en fait un beau livre-dvd publié en Allemagne mais dont le film est sous-titré en français et en anglais, comme sont sous-titrés en anglais les « extras » , dont des interviews touchantes et éclairantes. Nous ne ferons aucun commentaire sur le fait que les maisons d’édition cinématographiques françaises jugent inutiles de publier, avec sous-titres français, des films comme le Sebastiane de Jarman ou ce Chat qui pense, en l’honneur d’un grand metteur en scène homosexuel allemand. Notons que cette édition comporte aussi son premier court-métrage en noir et blanc, Miriam. En attendant que la France soit moins frileuse et prenne conscience du vaste public qui aimerait voir et revoir ces films dans des conditions confortables, merci à l’ Allemagne de nous les rendre en grande partie accessibles !

Beau livre-dvd donc, avec des photos finement sélectionnées de lui, de ses amis, de ses collaborateurs, de ses acteurs et actrices, avec aussi de hautes phrases aimées de Schmidt comme une d’Oscar Wilde que l’on pourrait traduire ainsi : « Nous sommes tous dans le caniveau, mais il en est qui regardent les étoiles ». Regarder vers les étoiles, chercher les hauteurs pour échapper aux bourbiers et aux miasmes : le leitmotiv poétique de la montagne est constant dans le film de Hoffmann et Jaberg, en inserts de plans magnifiques de rocs enneigés qui nous parlent des origines de la vie de Schmid, là-haut sur les hauteurs suisses, et la caméra les survole pour nous peindre cet albatros des Grisons que fut Daniel Schmidt.

Le chat qui pense a toujours la touche délicate pour le dépeindre : le film balaye sa vie et son œuvre chronologiquement et intimement, du dehors et du dedans, en faisant alterner extraits de films et interviews. Pas de portrait flatté, pas d’impasse sur les ombres comme dans tout vrai portrait amoureux : sont évoqués l’humeur tempétueuse parfois, l’addiction à l’herbe pour affronter le réel, le cancer de la gorge qui frappa ce grand bavard et bel orateur. La complicité créatrice du cinéaste et de son cameraman, Roberto Berta, éclate dans les plans et séquences éblouissants que nous entrevoyons de La Paloma, par exemple. Ingrid Caven y est rayonnante, comme elle le fut dans le spectacle en solo que Fassbinder et Schmidt montèrent pour elle au Pigall’s de Montmartre en 1978, spectacle de glamour cru, dans les miroirs et la poussière d’un ancien cabaret de strip-tease, qui mit en transe le tout-Paris !

S’esquisse petit à petit, dans Le chat qui pense, un portrait de cinéaste en marge des courants engagés de son temps, choisissant l’intime pour parler du collectif, le va et vient parfois entre la beauté classique et le sourire tendre du kitsch, la stylisation théâtrale des passions, le lien constant entre l’individu et le paysage qui l’entoure, l’explique et le colore. Schmidt fut toujours un artiste libre, comme ses amis Fassbinder et Schroeter, pensant que, quoi que l’on filme, c’est toujours de soi que l’on parle, que l’on n’atteint profondément les spectateurs qu’en approfondissant le moi. En témoigne par exemple son voyage au Japon, où son art est tenu en très haute estime, et qui devient, dans Visage écrit, un voyage onirique, raffiné, poignant, où, dans une séquence inoubliable, par l’insolite grâce d’un « onnagata », danseur homme de kabuki, en lourd chapeau de femme 1900, le bas du corps dans les eaux d’un fleuve ou d’un estuaire, sur fond bleu du soir criblé des lumières de Tokyo, on atteint, pour le public du monde entier, par les « correspondances » de la musique de Liszt, de la chorégraphie et du cadrage du personnage presque fondu en ombre chinoise dans le bleu qui l’entoure, une épure lente et sublime de sensuelle mélancolie !

Ce que le film de Hoffmann et Jaberg parvient aussi à cerner, c’est le déclic premier, la clef de voûte de l’univers original de Daniel Schmidt : il eut une enfance d’éblouissements, dans un hôtel de luxe, au grand air des Grisons, luxueusement fréquenté, tenu par de fortes femmes, sa mère et sa grand-mère, qui surent trouver l’art d’accueillir la fine fleur de leur clientèle, enfance qui lui laissa toute une mythologie intérieure comme le Combray et le Balbec de Proust. Beaucoup de ses films sont d’ailleurs tournés dans ce paysage premier, en particulier Hors-saison qui est comme la résurrection onirique, pétrie de vérité et de fiction savamment amalgamées, de cette enfance. L’enfant et l’artiste ensuite ne cessent de convoquer des fantômes de cet hôtel de lanterne magique, et tout particulièrement les clientes fascinantes d’élégance, de mystère et de sensualité mêlés qui deviendront, dans les films de Schmid, les rôles incarnés par Bulle Ogier, Ingrid Caven, Lucia Bosé, Lauren Hutton, Arielle Dombasle, Andréa Ferréol… Pas de mièvrerie nostalgique chez lui, mais l’avènement poétique d’un temps constitutif du moi et retrouvé grâce à l’art. Schmidt lui-même, dans l’interview des « extras » du DVD, souligne cette obsession de l’artiste selon lui : protéger jusqu’à la mort les éblouissements vitaux de l’enfance. À un certain moment, sa vraie vie est devenue le cinéma.

Mais sans jamais oublier l’amour. Est évoqué en filigrane, dans le film comme dans les interviews des extras, le rôle de l’amour vrai dans la vie de Schmidt. Dans ce domaine aussi, le cinéaste va droit au but : à son interlocuteur qui lui demande si la vie l’a aimé, il répond, en substance, que oui, puisque, né dans un monde protestant où l’on n’avait le droit ni de se toucher ni de pleurer, il a pu, grâce à deux hommes, – dont le second l’a accompagné jusqu’au bout – vivre les deux.

Vient de paraître (mai 2011) : ÉMERGENCE DE L’HOMOSEXUALITÉ DANS LA LITTÉRATURE FRANÇAISE D’ANDRÉ GIDE À JEAN GENET de Patrick DUBUIS

L’étude de Patrick Dubuis couvre quasiment un siècle de l’histoire littéraire française sous l’angle de l’homosexualité. La 4ème de couverture de cet ouvrage très substantiel nous rappelle que s’il existe des ouvrages généraux sur l’homosexualité dans les littératures étrangères, la France a toujours préféré le choix « pudique » d’études individuelles, s’intéressant par exemple à l’homosexualité d’André Gide ou à celle de Marcel Proust.

Le présent ouvrage, en s’interrogeant sur le foisonnement exceptionnel de la littérature homosexuelle qu’a connu la France au début du XXème siècle, se propose de combler cette lacune dans les études critiques portant sur l’homosexualité en littérature. À côté des œuvres d’écrivains majeurs, tels que Gide, Proust, Jean Cocteau, Jean Genet, Julien Green, Henry de Montherlant, ou encore Marguerite Yourcenar, le lecteur découvrira dans ce livre d’autres écrivains certes tout aussi réputés mais dont cet aspect de l’œuvre, même s’il peut être considéré comme déterminant, n’a suscité que peu d’intérêt : Max Jacob, Marcel Jouhandeau, Roger Martin du Gard, François Mauriac.

Sans prétendre à l’exhaustivité, cette étude fait aussi sortir de l’ombre des écrivains non pas mineurs, mais moins connus comme René Crevel, Pierre Herbart, Maurice Sachs, Francis Carco et une pléiade d’auteurs qui, après avoir connu des gloires très inégales de leur vivant, ont sombré dans un oubli quasi total : Axieros, Henri Deberly, Jean Desbordes, Charles-Etienne, Marcel Guersant, Henry-Marx, Maurice Rostand…

Ce livre était nécessaire, non seulement parce qu’il est très instructif, mais parce que l’auteur, avec conviction, parvient tout au long de son étude à démontrer que les écrivains du siècle passé avaient « un rôle aussi déterminant que difficile à jouer : il ne s’agissait rien de moins que de sortir l’homosexualité des laboratoires d’expérimentation où l’avaient confinée les instances du pouvoir. Et ils n’y faillirent pas. »

Signalons enfin qu’une abondante bibliographie et un index détaillé occupent près de vingt pages de ce livre remarquable par son champ d’étude.

Sophie DEMMLER a lu PHAIDRA

Le 19 mars 2011, à la Maison de la Grèce, attentives, silencieuses, comme prises de frissons à certains moments, près de quatre-vingts personnes ont écouté Sophie Demmler lire intégralement le monologue poétique de la Phaidra de Ritsos, s’adressant à un Hippolyte muet, rendu présent par la seule parole de l’héroïne enflammée de désir pour lui.

Nikos Graikos, d’abord, coordonnateur pour Phonie-Graphie, puis Yvan Quintin, éditeur, ont ouvert cette soirée de lecture publique par une présentation de cette œuvre de Yannis Ritsos, Phaidra.

ErosOnyx Editions tient à remercier les services du Consulat de Grèce à Paris pour avoir mis à sa disposition les salons de la Maison de la Grèce, à l’occasion de la sortie de Phaidra., en édition bilingue.

La soirée s’est achevée, après la remise d’un superbe bouquet de lilas blancs et de lis à la comédienne, autour d’un buffet offert par Phonie-Graphie. Que cette association pour la promotion du grec moderne en France en soit aussi remerciée !

FLEUR DE CHAIR, La Cigogne, revue bruxelloise

« L’écriture est aisée, subtile dans l’exposition d’états d’âme. Dans Fleur de chair l’acte sexuel ne se réduit pas à un plaisir purement physique. Oui, il arrive qu’il procède d’une pulsion instinctive, sans préméditation d’expérience ou de séduction, mais il est aussi l’aboutissement d’une passion amoureuse, transcendée par un total don de soi.

L’Énéide revisitée, une très belle et attachante nouvelle, en est l’exemple. Tous les personnages sont du même sexe. Peu importe! Éros se révèle toujours avec les mêmes élans.