LE JARDIN DES PASSAGES À QUÉZAC, CANTAL… UN ENDROIT DIFFÉRENT

En pleine Châtaigneraie cantalienne, non loin de Maurs, petite ville du Cantal sur la route qui mène à Figeac vers le sud et vers Aurillac dans l’autre sens, c’est Quézac. Cette commune d’environ trois cents habitants, déjà connue comme lieu de pèlerinage depuis le Moyen Âge, mérite d’être connue aujourd’hui pour une autre raison : c’est là que se trouve Le Jardin des Passages, lieu d’accueil de garçons et de filles, de jeunes femmes et de jeunes hommes – mais toujours majeurs – de ceux que l’on appelle… LGBT. Un lieu d’accueil, non pas de refuge.

Voici ce qu’on lit sur le Net : « Il propose […] de l’accueil, des séjours de repos ou de résidence, ateliers créatifs, culturels et artistiques. Il tend à répondre à l’envie d’expérimenter ensemble d’autres moyens de se nourrir et de créer du lien en partageant un quotidien collectif sur du court, moyen et long terme ».

Dans une grande maison que jouxte une plus petite sur un terrain d’environ un hectare, résident les quatre personnes qui constituent le collectif d’accueil. Quelle heureuse surprise de découvrir l’existence d’un tel lieu LGBT ! En pleine campagne. Pour qui a besoin de se ressourcer ou seulement de répit, d’éloignement d’une éventuelle hostilité ambiante, d’un environnement social ou familial autrement, le lieu est idéal. Il est demandé un minimum de 4, 00 € par jour pour y dormir et manger. Soit on y est de passage soit on peut y résider en échange d’aide aux diverses activités comme le jardinage, la cuisine… Mais on peut aussi s’adonner à une activité artistique. Les résidents, quels qu’ils soient, produisent eux-mêmes et dans la mesure du possible leur nourriture.

Le Jardin des Passages est une association loi 1901 qui s’est créée pour acheter, dans un premier temps, ce lieu d’habitation et d’accueil LGBT. On trouvera les coordonnées de l’appel au financement sur le lien suivant

https://www.helloasso.com/associations/le-jardin-des-passages

Oui, quelle belle idée que cette association LGBTQIA+ comme on dit aujourd’hui ! Dans le Cantal qui plus est !  Si vous en avez l’occasion, arrêtez-vous à Quézac.  Par curiosité, par besoin de vivre mieux votre différence ou simplement par intérêt pour la différence…  peu importe. Vous y serez accueilli avec le sourire. Puisse cette création être un exemple pour des réalisations semblables, ailleurs, dans des régions et des lieux de France retirés, que ce soit des lieux anciens de pèlerinage ou non ! Ces lieux d’accueil à la campagne sont encore trop rares.

  On peut ne pas être d’accord avec les présupposés de cette association, sur l’écologie par exemple ou bien sur la binarité sexuelle (d’où l’usage du terme ‘’queer’’ des membres de l’association), il n’empêche ! Voir des filles et des garçons tenter de vivre autrement leur différence, à la campagne qui plus est, c’est revigorant.

Le Jardin des Passages, 4 route de Siscamp 15600 Quézac

lejardindespassages@protonmail.com

JEUNES FILLES EN UNIFORME (1931) au cinéma

Dans le cadre du ciné-club « Le 7ème genre », au BRADY – Paris Xème – sera projeté le 20 mars 2023 à 20 h 30, le film JEUNES FILLES EN UNIFORME (1931), de Leontine SAGAN, adapté de la pièce homonyme de Christa WINSLOE.

La pièce originale a été publiée, en juin 2022, chez ErosOnyx éditions, dans une nouvelle traduction, avec le DVD du film.

Les sous-titres de ce film rare, premier film lesbien de l’histoire du cinéma et qui sera interdit par les nazis à partir de 1933, sont de Colette pour la projection française de 1932.

La soirée sera animée par Florence Tamagne.

IN MEMORIAM : JEAN-CLAUDE FÉRAY

Nous avons appris tout à fait par hasard, oui, accidentellement, le décès de Jean-Claude Féray, qui fut un ami pendant de nombreuses années, éditeur, auteur lui-même, chercheur, historien, grand connaisseur d’une histoire particulière, celle de l’amour que l’on dit grec. il avait créé une maison d’édition, appelée Quintes-Feuilles, très active pendant les deux premières décennies de ce siècle . Durant ces vingt ans, il a publié plus de 30 titres d’auteurs français (dont lui-même) ou étrangers. Il travaillait seul, mais savait aussi apporter sa contribution à d’autres maisons d’édition. Ainsi a-il écrit, pour ErosOnyx éditions en 2016, la longue présentation d’Imre (pour mémoire) d’Edward I. Prime-Stevenson sous le titre « Mélomane, lettré, polyglotte, racé : Prime-Stevenson, type du gentleman homosexuel de la Belle Époque ». Il a aussi apporté une contribution remarquable, en quatre articles, à la réédition récente (automne 2022) d’Akadémos chez Gay Kitsch Camp pour le volume de présentation de cette réédition, intitulé Akademos, mode d’emploi.

Homme de conviction, parfois difficile, Jean-Claude Féray manquera au monde de ceux qui vivent, recherchent, aiment vivre des amours différentes, aux curieux, aux amateurs (au sens propre de ce terme) et défenseurs de ces amours, que ce soit en littérature, anthropologie, arts visuels…

Jean-Claude Féray a aussi, pendant plus de huit ans, publié sur le site de Quintes-Feuilles de nombreux bulletins numériques copieux, illustrés, téléchargeables, tous en rapport avec le thème auquel il était si attaché, l’amour grec. Signalons justement l’ imposant ouvrage de Will H. L. Ogrinc, Boyhood and Adolescence, Ephebologia, Hebephilia and Paedophilia : A Selective Bibliography (2017).

Né en 1948 dans ce qui était alors l’Indochine française, Jean-Claude Féray est mort le 13 septembre 2022 en Normandie où il s’était retiré.

A NEW STAR IS BORN : Hors Champ, éditeur des marges

CRÉATION DES ÉDITIONS HORS CHAMP, SPÉCIALISTES DE LA MÉMOIRE DES MARGINALITÉS

Le concept à l’origine du projet

Parce que la différence fait parfois peur à l’industrie du livre, l’idée s’est imposée de créer une maison d’édition indépendante consacrée à l’underground, aux marges culturelles et aux homosexualités. 

Notre politique éditoriale

Mémoires inédits de témoins en prise avec une époque, monographies d’artistes menacés par l’oubli parce que réfractaires à la doxa, récits et biographies dédiés à des personnages seconds mais pas secondaires, Hors Champ souhaite mettre en lumière des vies singulières et des trajectoires parallèles afin de préserver la mémoire de mondes disparus ou en passe de le devenir. 

Les publications à venir

Monographie Pierre Sala (1948-1989) : artiste inclassable – il fut à la fois designer, architecte d’intérieur, scénographe, metteur en scène et directeur de théâtre –, Pierre Sala (1948-1989) a traversé la scène créatrice parisienne des années 1970/1980 comme une météorite. Son talent fut de développer avant l’heure une approche interdisciplinaire en jetant des ponts entre théâtre et arts plastiques. 

Mémoires de Claude Loir (né en 1944) : pionnier du cinéma X, aventurier de la libération sexuelle et témoin privilégié du Paris underground des années 1960 et 1970, Claude Loir se livre sans faux-semblants pour raconter une existence tout entière tournée vers la recherche de liberté. 

Les Éditions Hors Champ, qui sommes-nous ?

Damien Roger, co-fondateur et directeur des éditions Hors Champ, est haut- fonctionnaire au ministère de la Culture et ancien élève de l’ENA. Il collabore régulièrement à des revues comme Le Journal des Arts et Gonzaï. Il mène en parallèle une activité d’écriture (publication en février 2023 d’un roman aux éditions Privat). 

Jérôme Kagan, co-fondateur et directeur littéraire, s’est engagé dans la voie du journalisme après un cursus à La Sorbonne. Sa passion pour les avant-gardes artistiques de l’entre-deux-guerres l’a conduit à publier en 2019 un ouvrage sur les Années folles. Il est également l’auteur d’une biographie remarquée de Condé Nast. Chaque mois, pour les lecteurs de France-Amérique, il dresse le portrait d’excentriques et jolis monstres du siècle passé. 

Contact : contact@editions-hors-champ.fr

PAULINE PARIS AU PAYS DE COLETTE

« J’étais ravie de passer cette soirée hors du temps (…) la semaine dernière. Je redescends petit à petit, au gré du vent, de mon nuage… » nous a écrit, ce 21 juillet, Pauline Paris qui a donné un récital à Saint-Sauveur-en Puisaye, en Bourgogne, au pays de Colette le 15 juillet dernier, dans le cadre du » Festival de Saint-Sauveur-en-Puisaye : un été chez Colette » qui se rient chaque année de fin juin à fin août . Organisé par l’Association des Amis de Colette, ce récital a eu lieu en plein air, sur le pâtis du château qui abrite le Musée Colette. En plein air et en soirée, avec le soleil couchant pour magnifique projecteur. Il dardait ses rayons à travers le feuillage d’un immense et vieux noyer sous lequel se tenait l’assistance. Et roucoulaient, entre deux chansons, les colombes du donjon envoyées par Aphrodite.

Rappelons que Pauline Paris a d’abord monté un spectacle musical et théâtral, « Vivien 21 », autour de Renée Vivien. Deux des photos ci-dessous ont été prises au Bouillon Julien, brasserie sise rue du Faubourg Saint-Denis à Paris Elle y est Comme sur ces photos, elle accompagnée de Duncan Roberts (à droite) et Rafaël Leroy (à gauche), entrecoupant ses chansons d’épisodes de son histoire personnelle, « pour finir par ne faire plus qu’une avec elle. » . Quant à la première photo, il s’agit de Renée Vivien elle-même qui aimait se travestir, dans le cas présent en « incroyable » dont notre Pauline reprend le couvre-chef, le jabot et la redingote en de récital.
Qu’a-t-elle chanté au fait ce soir du 15 juillet ? Les Treize poèmes de Renée Vivien qu’elle a, sur les conseils d’Hélène Hazera, mis en musique et publiés chez ErosOnyx éditions dans un livre-CD, via l’entremise de la viviénienne Nicole G. Albert qui, restée sous le charme d’un récital de Pauline Paris à la librairie Violette & Co, souhaitait que reste une trace de cet enchantement. Douze poèmes de René Vivien auquel il faut ajouter un fragment de Sappho, devenu « Prolonge la nuit » , que Vivien a elle-même traduit et adapté du grec ancien. Bien sûr, on pourra penser à la chanson de Johnny Halliday « Retiens la nuit » ( paroles de Charles Aznavour, musique de Georges Garvarentz), mais si cette chanson ne manque pas de charme et d’émotion, le poème de Sappho-Vivien, mis en musique et chanté par Pauline Paris, est… saphiquement différent. Notons aussi dans ce recueil, comme sur scène, le poème « The Fjord Undine », écrit et publié en anglais par Renée Vivien, dans un autre ouvrage, The One Black Swan /Le cygne noir (également disponible aux mêmes éditions). N’oublions pas que Vivien était anglaise de naissance et s’appelait Pauline Tarn (tiens ! Pauline comme notre artiste !). Ce n’est pas Pauline qui cette fois l’a chanté, mais il a été superbement dit, en anglais donc, par Duncan Roberts, l’un de ses deux musiciens (basse, guitares, percussions), avec Raphaël Leroy au yeux pers, guitariste et bassiste, tous les deux au mieux de leur talent.

Superbe soirée que Colette, auteure de belles pages sur Renée Vivien dans Le pur et l’impur, n’a pu qu’aimer, où qu’elle soit, comme les spectateurs étonnés d’abord, puis vite ravis, comme enchantés. Renée Vivien, pour garder ses amantes, disait à Aphrodite « Prolonge la nuit ». Pauline Paris, elle, l’a chanté à son public, comme pour le retenir.

Crédit Pauline Paris 2022

PHAIDRA, FANNY ARDANT, LA FILLE DU VENT

 CHAMADE EN SATIN ROUGE

Spectacle pour instruments et voix du Geneva Camerata

donné en première mondiale au Bâtiment des Forces Motrices

 à Genève le jeudi 27 janvier 2022

David Greilsammer, dans le cadre de ses ʺconcerts prestigesʺ, a donné à voir et à écouter un triptyque musical et théâtral qui, quelques jours après le spectacle, laisse le percutant souvenir d’une chamade en satin rouge.

Un spectacle homogène dont les trois temps se répondent en un tout organique. Prologue, monologue vocal sur fond musical et épilogue se placent tous les trois sous le signe de la percussion, celle de la musique symphonique prenant, comme dans un écrin, un poème en prose de passion interdite écrit par Yannis Ritsos, Phaidra, Phèdre selon Ritsos, une Phaidra portée par la longue silhouette, l’âme et la voix de Fanny Ardant. On entre dans le spectacle par le solo de percussions qui ouvre la Symphonie n° 103 de Joseph Haydn, dite « roulement de timbales » et, durant tout le spectacle, cette chamade ne se posera brièvement que pour reprendre autrement et de plus belle, y compris dans le détonnant épilogue, improvisation confiée à Jonathan Keren. David Greilsammer parvient à nous prendre dans une fougue sans cesse renaissante et qui ne s’apaise que pour mieux nous transporter dans le double orgasme de l’amour et de la mort.

Après le prologue percutant d’un Haydn dont la frénésie dit, durant toute la symphonie,  l’énergie de vivre et de créer à plus de 50 ans, comme si le temps fouettait le sang au lieu de le glacer, David Greilsammer a confié à Bastien David, né en 1990, la délicate tâche de créer une toile de fond musicale à la pièce de Ritsos. Bastien David a donc écrit une « Phaidra », pour comédienne et orchestre, à la fois sobre et sourdement menaçante. Pari subtil de servir le monologue de Phaidra sans jamais étouffer la voix parfaitement articulée de Fanny Ardant et d’y fondre en même temps la moiteur animale du désir de Phèdre pour le jeune Hippolyte. On y entend, comme si l’on était dans les bois et près des étangs, mêlés à l’orchestre, des feulements de fauves et des chants de rainettes qui prolongent et colorent le poème dramatique de Ritsos où Phaidra se sent tour à tour, dans ses appels de bête en mal d’amour, fauves au début et rainettes à la fin. Quant à l’épilogue, que l’on pourrait attendre comme un requiem après le triomphe de la nuit apaisante sur l’incandescence de Phaidra, il n’en est rien : les Préludes et improvisations sur des thèmes de Haydn de Jonathan Keren, né en 1978, sont un medley étonnant où classique et jazz reprennent les motifs de percussion de la symphonie de Haydn comme pour défier la mort. On y frappe même de la main le bois de la contrebasse pour que s’emballe le rythme du cœur. Même le requiem piaffe de vie, mêle ses timbales et ses cors dans un spectacle où le funèbre en filigrane le dispute toujours à l’ardeur sans jamais l’emporter. Il n’est que de regarder David Greilsammer conduire l’orchestre pour sentir que tout bat la chamade dans ce spectacle, y compris sa baguette.

Voix et instruments au diapason. Fanny Ardant se glisse en Phaidra comme en un long gant d’élégance et de désir. Talons hauts, silhouette altière, crinière fauve, corsage de voile noir et jupe fourreau de satin rouge, à la croire plus jeune qu’Hippolyte, absent de la scène mais partout présent dans le noir et dessiné par les mots de Phaidra. « Je t’ai fait appeler » : Fanny Ardant dit son rôle en comédienne qui le sait sur le bout des ongles et peut le vivre face au public dans l’ombre. Nous vivons la dernière heure de Phaidra, mariée à Thésée et amoureuse éconduite du fils de son époux, embelli par son goût de la chasse mais ignorant des appels d’Aphrodite. Plus rien à perdre pour Phaidra. Tout à gagner dans une déclaration à nu et tout habillée en même temps de délires orgiaques pour que le fils de l’Amazone, le fier disciple d’Artémis rentré tout poussiéreux de sa journée de chasse, comprenne qu’elle l’aime à en mourir. Elle va de visions en visions pour exciter le bel indifférent : rêver d’être sa proie dans les buissons pour qu’il la tue et la prenne dans ses bras, vouloir de lui une plume pour un chapeau, une de ces plumes arrachées qui laissent « un trou rouge » dans la chair d’un oiseau, rêver d’être un cheval attaché à une corde par une patte, fougueux jusqu’à se mutiler pour être libre, rêver de faire éclater les masques, que le sang de vérité puisse sourdre, se délecter de l’odeur de sperme restée entre les draps de ce jeune homme étrangement solitaire, lui voler sa petite croix d’or et se délecter de le voir à quatre pattes la chercher sous les armoires, vouloir entrer au bain avec lui pour le laver tout entier de sa suave sueur, se sentir pareille aux rainettes de cette nuit de printemps coassant de désir à la lune… et puis en venir à l’extase de mourir dans cette « nuit incorruptible », face à l’intouchable que l’on vient d’éclabousser de toute sa chamade de mots. Rien d’étonnant à ce que, dans la composition fluide de Bastien David, se glissent des feulements de fauves et des coassements de rainettes quand Phaidra se sent vivante et mouvante comme ces bêtes qui vivent à son diapason.

Phaidra, fille du vent, fille du sang, femme libre de dire, comme un homme, sans peur, sans pudeur, à l’éphèbe au petit crucifix d’or qu’elle lui a volé pour le porter entre ses seins : « Ta sainteté avant le péché, je n’y crois pas ; je la déclare impuissance, je la déclare lâcheté ». Aimer jusqu’à défier Dieu pour libérer le bel Éros. Il faut être Phaidra et  Fanny Ardant pour oser ça !

                                                   Pierre Lacroix, co-éditeur d’ErosOnyx

POUR EN SAVOIR PLUS SUR BASTIEN DAVID, COMPOSITEUR DE LA MUSIQUE DE « PHAIDRA » POUR COMÉDIENNE ET ORCHESTRE :

PHAIDRA, basé sur le poème dramatique de Yannis Ritsos

Commande du Geneva Camerata – Création Mondiale

Traduit du grec par Anne Personnaz et publié aux éditions ErosOnyx

Grâce à son génie, à son courage et à son humanité, Yannis Ritsos est considéré comme l’un des plus grands poètes de la Grèce moderne, ainsi qu’un héros qui a transformé l’histoire de son pays. Né en 1909, il rejoint le parti communiste dès l’âge de vingt-cinq ans et se bat au sein de la Résistance contre l’occupation nazie en Grèce. Malgré les terribles difficultés qu’il traverse durant sa vie – comme son emprisonnement et sa torture par la dictature grecque – Yannis Ritsos reste engagé politiquement jusqu’à sa mort en 1990. C’est en 1978 qu’il achève Phaidra, un chant d’amour à la fois poétique, érotique et tragique, s’inspirant du personnage de Phèdre dans la mythologie grecque. Ce chef-d’œuvre de Ritsos rend hommage à la force et à la détermination d’une femme courageuse qui décide de suivre son inexorable passion, jusqu’au bout de la souffrance et du tourment.

Le compositeur Bastien David écrit au sujet de sa nouvelle pièce : Dans Phaidra de Yannis Ritsos, nous vivons la déclaration amoureuse de Phèdre pour Hippolyte, le fils de son mari Thésée et de l’Amazone Antiope. À travers ses mots dénués de pudeur, Phèdre exprime ardemment l’immense souffrance qu’elle traverse ainsi que le désir éternel qu’elle éprouve pour ce jeune homme qui la rejette. Tout au long du monologue, nous retrouvons l’omniprésence du sang, de l’eau, du sperme, de la sueur, et de tous les autres mots qui peuvent faire référence aux fluides corporels. J’ai composé la musique en m’inspirant de ces matières vivantes, liquides et mouvantes, qui composent la quasi-totalité de notre corps.

À travers la musique, j’ai souhaité sculpter un flux sonore en mutation perpétuelle, afin de transmettre à l’auditeur les sensations physiologiques de Phèdre, ici incarnée par la voix charnelle et poignante de Fanny Ardant. De plus, j’ai voulu mettre en valeur la métamorphose que traverse la protagoniste, provoquée par la passion irrépressible qu’elle ressent pour Hippolyte. L’inertie des sentiments se traduit musicalement par la lenteur et l’obsession. Dans ce moment de détresse, l’irréversible se met graduellement en place… La musique devient alors le sel de mer qui ronge progressivement la roche des calanques, jusqu’à la rendre aussi coupante que les lames d’un rasoir ; ou encore, l’écoulement d’une rivière souterraine, qui finit par creuser dans la pierre les sillons du futur.

                                                 LA FILLE DU VENT, PROGRAMME, page 19

EXPOSITION DEREK JARMAN À LA MANUFACTURE DES ŒILLETS À IVRY/SEINE (94)

Dead Souls Whisper met en regard les films Super 8 de Derek Jarman produits au milieu des années 1970 et sa pratique de la peinture et des assemblages à travers une cinquantaine d’œuvres réalisée depuis le moment où il est diagnostiqué séropositif en 1986 jusqu’à sa mort. Cette période coïncide avec celle où il fait naître son jardin légendaire autour de Prospect Cottage à Dungeness dans le Kent, dont la création a été pour lui une thérapie, une métaphore de sa bataille acharnée pour la vie, un jardin de la nature moderne à même de lutter contre les crises. Son jardin n’est pas un refuge mélancolique mais un lieu de création. Et s’il n’est pas représenté véritablement dans l’exposition, il est néanmoins omniprésent. Derek Jarman faisait partie, aux yeux de la société, d’une minorité homosexuelle. Cette exposition rappelle que si la société avance, c’est bien souvent aux minorités qu’elle le doit. Ce combat existe toujours et nous concerne.

Lorsque Jarman apprend sa séropositivité, il met toute son énergie à faire savoir l’impact du sida sur la communauté homosexuelle et sur sa propre vie à travers le contenu de son œuvre, son esthétique et son absolue nécessité de porter l’autobiographie au rang universel. Il est sur tous les fronts : sexuel, artistique, activiste. Jarman, quasiment aveugle lorsqu’il produit Blue, propose au spectateur, une expérience d’écoute et de retour à soi, basée sur la perception des mots qu’il a écrit dans son journal intime et qu’il fait dire à des voix amies accompagnées d’une bande son composée par le musicien Simon Fisher Turner. Le long métrage Blue (1993) est diffusé dans le Crédakino tout au long de l’exposition.

Cette exposition est accompagnée d’une diffusion des films The Tempest (du 24 au 30 novembre) et Jubilee (du 1er au 7 décembre) au cinéma d’Ivry — Le Luxy et d’une publication en coédition avec la collection Pleased to meet you.

Le film de Jarman Sebastiane a été édité comme supplément au livre de Didier Roth-Bettoni, Sebastiane ou Saint Jarman, cinéaste queer et martyr. L’ouvrage est toujours disponible en librairie et à la librairie du CREDAC.

Événements à venir :

  • Dimanche 28 novembre de 15h à 17h
    Dungeness’ seed bomb
    Workshop avec Benoît Piéron (artiste) ouvert à tous les publics
  • Mercredi 1er décembre et Jeudi 2 décembre
    À l’occasion de la journée mondiale de lutte contre le sida, diffusion du film Blue à la Bourse de Commerce — Pinault Collection

Dimanche 12 décembre à 16h
The Last of England
16h
Visite de l’exposition Derek Jarman – Dead Souls Whisper (1986-1993) en compagnie de Yann Beauvais.
18h
Projection du film The Last of England au cinéma d’Ivry – le Luxy, suivi d’une discussion avec Yann Beauvais
Visite de l’exposition gratuite.



À GENÈVE, LE 2 NOVEMBRE 2020, FANNY ARDANT INTERPRÈTE PHAIDRA DE RITSOS

En raison des mesures sanitaires en vigueur dans le canton de Genève, la soirée  » POUR L’AMOUR DES ÉTOILES  » prévue initialement pour le 2 novembre 2020 est annulée et reportée sine die.

REPORTÉE EN 2021 ET SURTOUT PAS ANNULÉE !

Félix Mendelssohn (1809-1847)
SONGE D’UNE NUIT D’ÉTÉ · OUVERTURE

Bastien David (né en 1990)
« PHAIDRA »· NOUVELLE PIÈCE POUR COMÉDIENNE & ORCHESTRE
COMMANDE DU GENEVA CAMERATA · CRÉATION MONDIALE
Avec la participation de Fanny Ardant

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
LA FLÛTE ENCHANTÉE · OUVERTURE

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
AIRS DES GRANDS OPÉRAS AVEC QUATRE SOLISTES LYRIQUES & ORCHESTRE
Avec la participation de Clémence Tilquin, Mélodie Ruvio, Vincent Lièvre-Picard, Benoît Arnoult

GENEVA CAMERATA – GENÈVE
SOIRÉE DU 2 NOVEMBRE 2020, 20 h
POUR L’AMOUR DES ÉTOILES

FANNY ARDANT
COMÉDIENNE

CLÉMENCE TILQUIN
SOPRANO

MÉLODIE RUVIO
CONTRALTO

VINCENT LIÈVRE-PICARD
TÉNOR

BENOÎT ARNOULD
BARYTON-BASSE

ENSEMBLE VOCAL DE LAUSANNE
CHŒUR

DAVID GREILSAMMER
DIRECTION

– BASTIEN DAVID (NÉ EN 1990)
NOUVELLE PIÈCE MUSICALE POUR COMÉDIENNE ET ORCHESTRE
COMMANDE DU GENEVA CAMERATA ・CRÉATION MONDIALE

– WOLFGANG AMADEUS MOZART (1756-1791)
REQUIEM EN RÉ MINEUR


QUI EST BASTIEN DAVID ?

https://www.bastiendavid.com/Agenda.D.htm

Ci-dessous Bastien DAVID, Fanny ARDANT, David GREILSAMMER